Mes lectures du mois : Juin/Juillet 2001

Voici un avis (qui n'engage que moi ...) sur les dernières BDs que j'ai lues. Tous ces albums ne sont pas issus des Editions Delcourt et tous ne sont pas des nouveautés mais j'aime bien partir à la découverte d'auteurs qui me sont inconnus (sur les conseils de mes libraires favoris ou ... des vôtres).


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Astérix : T31 Latraviata (Uderzo - Editions Alber-René 2001)
Sans doute moins pitoyable que le précédent (La galère d'Obelix), cet Asterix, malgré une bonne idée de départ et le trait toujours aussi précis d'Uderzo, n'atteint pas les sommets (loin de là). Comme c'est le cas depuis de trop nombreux volumes, le scénario utilise des artifices qui jette à bas la cohérence de l'ensemble (l'épisode des dauphins par exemple). Alors, même si cet épisode n'est pas dénué d'humour (mon fils de 8 ans a tout de même bien ri), on est très loin de l'esprit du regretté (et irremplaçable) Gosciny.....

Rural (Davodeau - Delcourt - 2001)
C'est l'histoire d'un coin tranquille à la campagne. Un couple achève d'y retaper une vieille bâtisse devenue en dix ans de travaux une agréable maison. Un peu plus loin, trois jeunes paysans, convaincus qu'une autre agriculture est possible, tentent le pari du bio. Tout va bien, jusqu'au jour où la nouvelle tombe : le tracé d'une future autoroute passe ici-même. Durant une année entière, Étienne Davodeau a suvi ces gens crayon en main, a mené son enquête sur les origines de cette décision absurde et ses répercussions dramatiques sur la vie d'une région.
Si vous n'appréciez pas trop l'ultra médiatisation du personnage, passez outre la préface de José Bové ...
Encore une fois, Davodeau fait mouche ...S'il est certain que les lecteurs "purs" citadins ne seront pas très sensibles aux charmes de cet album, pour les autres, les plus nombreux qui comme moi ont des racines paysannes pas trop lointaines, cet album les touchera par la justesse de son ton ...
Davodeau a croqué sur le vif avec beaucoup de talent des personnages et des situations qui font de cet album (de cette enquête) une véritable réussite.
Deux regrets : le sous-titre pas vraiment utile et la quasi absence des femmes :  lorsqu'on connaît le rôle capitale des épouses d'agriculteurs qui souvent cumulent en plus d'une activité professionnelle  les travaux  quotidiens de la ferme, elles méritaient sans doute une plus grand place dans cette magnifique histoire ...

Sanctuaire : T1 USS Nebraska (Dorisson/Bec - Humanoïdes Associés 2001)
Le USS Nebraska, sous-marin nucléaire américain en mission de surveillance le long des côtes Syriennes, reçoit un message de détresse non identifié qui le conduit au bout d’une immense crevasse sous-marine.
L’équipage y découvre l’épave d’un vieux sous-marin soviétique, gisant à proximité de ce qui semble être les gigantesques vestiges d’un sanctuaire antique. Alors que la décision est prise d'envoyer deux équipes de reconnaissance pour identifier l'épave et explorer les mystérieuses ruines, ce qui devait être une simple mission de routine va peu à peu se transformer en véritable descente aux enfers.

On commence par un grand sourire : même en 2029, ça m'étonnerais vraiment qu'on puisse plonger à 1200 m de profondeur, surtout en sortant d'un sous marin (dont l'intérieur est à la pression atmosphérique !).
Mise à part ce détail, USS Nebraska, dans un style très différent et beaucoup plus dynamique qu'Aquanaute (Dargaud) offre par son scénario tortueux à point et ses dessins remarquables un grand moment de lecture. Dorison nous refait le même coup que pour le 3ème Testament. De bon augure pour cette série dont on attend la suite avec impatience ....

Zentak T2-T3
Tim Page, ancien net-runner et mercenaire déchu, est embauché par un groupe d'investisseurs pour une opération grise : dérober des barrettes de mémoire au siège de la Continental Op. Aidé par Douglas et Blade, il s'acquitte de sa mission sans savoir qu'il est le jouet d'une manipulation orchestrée par une Intelligence Artificielle nommée Zentak.
Du pur "cyber punk". Mais bon, je n'avais pas tout compris lors de ma première lecture du T1. Puis, . profitant d'occasions Delcourt chez mon libraire préféré, j'ai terminé la série. Et ... la seconde lecture m'a apportée un  nouvel éclairage sur un série finalement assez passionnante à tel point que je la préfère maintenant à Nash ( qui traîne en longueur). 
En fait, il faut passer l'écueil du premier album pour apprécier cette série complexe. 

L'ombre de l'Echafaud : T1 l'affaire Brignou (Masbou/Cerquiera - Delcourt 2001)
Un soir, en s'introduisant chez le professeur Brignou, Fernand Froussard, cambrioleur de son état, assiste  à une étrange scène de dispute entre le professeur et un homme inconnu. Deux jours plus tard, l'affaire est à la une de tous les journaux, le professeur Brignou a été enlevé.
Au quai des Orfèvres, L'inspecteur Julien Parisi et Ernest Renoir, agent du gouvernement sont chargés du dossier. C'est le début d'une bien étrange enquête ...
On connaissait Masbou en tant que talentueux dessinateur de la série "De cape et de crocs", le voilà qu'il se révèle excellent scénariste dans une série qui renouvelle un peu  la collection "Terre de légendes". 
Grande réussite de l'album : l'ambiance (début de 20ème siècle matinée d'un légère touche de fantastique) prenante à souhait. Ensuite les personnages : deux couples de héros (bandits et policiers) aux prises avec le même ennemi, superbement bien campés par Masbou. Enfin le dessin de Cerquiera, qui pour un premier album, fait preuve d'une grande maîtrise et notamment dans l'utilisation de couleurs toujours en accord parfait avec l'ambiance imaginée par Masbou.
Petit bémol sur le découpage des planches (de trop nombreuses cases parfois) qui hachent  un peu la dynamique de certaines planches et surtout, surtout ... une grosse inquiétude pour Ferdinand, un des personnage les plus attachants de l'histoire et laissé en bien mauvaise posture à la fin de ce premier tome !!!

Ce qui est à nous : T4 Le pari (Chauvel/Le Saec - Delcourt - 2001)
New-York, 1917. Les Etats-Unis entrent en guerre. Meyer Lanski et Benny Siegel forment la band ede Grand Street et font leur premier coup. Leur route va croiser celle de Leland Turner, un parasite de salon qui a parié avec le puissant joueur A. Rothstein et qui a gagné. L'appât du gain va le mener loin ...
Le format bien particulier de ces albums et plus particulièrement leur pagination se prête bien à la narration de ces histoires anecdotiques, simples briques d'un édifice très audacieux. Chauvel, qui a effectué pour cette série un véritable travail d'historien, arrive ainsi assez miraculeusement à éviter une description qui aurait pu être rébarbative des faits et des personnages. Cet épisode en est un bon exemple.
Problème toutefois avec le prix de ces albums : 62 F (il vient d'ailleurs d'augmenter). Ce qui me semble un peu excessif !
Voici ce que F.Capuron a écrit sur le site Delcourt (07/2001) à propos du prix des BDs :
"Vaste et complexe sujet que celui du prix de la bd. Voici les chiffres à connaître pour mieux appréhender la question. Cas d’un album à 79 F : Part de la TVA donc de l’Etat 4 F, part fabrication (gravure, impression, papier reliure), 15 FF, part diffusion-distribution (représentants, stockage, expédition), 40 FF ( sur cette part le distributeur accorde la remise au libraire, 33 FF – reste grosso modo 2,50FF au diffuseur et 4,50 FF au distributeur), part auteur, 7 FF, part éditeur, 13 FF. Bien entendu, c’est sur ces parts que chacun s’appuient pour se développer, payer ses frais et ses employés, acheter ses nouilles, rémunérer la création, lancer un magazine, faire de la promo et des jolis primes, etc… Nous sommes dans une économie ou les marges sont très très faibles à tous les maillons de la chaîne. Il n’y a que sur le volume que chacun gagne de l’argent.  ...  Malheureusement, nous allons rejoindre nos confrères et augmenter nos prix (82 FF et 62 FF). Les prix du marché sont demeurés stables pendant plusieurs années mais, les hausse successives du papier et l’arrivée de l’euro nous poussent à la hausse."
"... les collections grands formats sont passées de 78 à 79 F l’année dernière afin de faire face à une importante augmentation du prix du papier. Le papier représente une part importante dans le coût de fabrication d’un livre (40% du poste impression qui représente lui-même 80% du coût de fab. Le papier est au livre ce que la farine est au pain…). Vous avez dû remarquer que l’ensemble des éditeurs ont augmenté où vont augmenter leurs prix, nous sommes tous soumis aux mêmes fluctuations des coûts extérieurs, ce n’est pas un hasard. Et, il y a l’euro, bien entendu, qui pousse à la hausse. L’ensemble de l’économie va connaître une inflation, ce n’est pas parce que nous sommes dans l’économie de loisir que nous allons y échapper- bien au contraire. Il y a 4 F d’écart entre la fabrication d’un petit format et celle d’un grand format. Cela peut paraître faible mais, il faut connaître l’ensemble du mécanisme pour bien comprendre. Les éditeurs appliquent un coefficient multiplicateur de 5 (grosso modo) au coût de fab. afin de déterminer le prix de vente. Ce coefficient n’est pas dû au hasard mais à de savants calculs de gestion qui disent qu’il faut 5F en prix public afin d’amortir 1F de fab. (ne pas oublier le grand nombre d’intermédiaires !). Ansi, 4F de fab = 20FF à la sortie. C’est l’écart de prix entre les petits et les grands formats. ...."

Le chant des Stryges : T5 Vestiges (Corbeyran/Guérineau - Delcourt 2001)
Houston, Texas. L'Ombre remonte la piste de Sandor G. Weltman en passant par la filière pharmacologique de son empire. Elle y découvrira bien plus qu'un indice.. De son côté, Nivek espère mettre le feu aux poudres en publiant un article choc sur les Stryges et en nommant les différentes personnalités liées à l'affaire. Quant à Josh et Gallagher, ils tentent fiévreusement de décrypter le très hermétique message de la créature.
Bon, d'abord, un mot sur le sujet dont tout le monde a parlé : le changement de coloriste. Si Isabelle Merlet n'a pas fait les couleurs de ce T5, ce n'est pas la faute de l'éditeur qui a du lui trouver un remplaçant au plus vite. Et Ruby ne s'en sort pas si mal que cela malgré l'utilisation d'outils informatiques qui donne un résultat que j'apprécie moyennement. Notons au passage que cette mini-polémique montre bien à quel point tout ce qu'un coloriste peut amener à un album.
Quant à l'histoire, avant dernier volume du premier cycle, il est conforme aux volumes précédents, c'est à dire toujours aussi prenant (même si je ne suis pas un grand fan de cette série...). Les Stryges sont de plus en plus présents ce qui est un peu dommage ...

Ingrid : T1 Le dernier voyage d'Opa Julius (Dethan - Delcourt 2001)
Un père et une mère, trois frère et sœurs, des grands-parents, des jeux et des problèmes d'enfant... Cette petite fille n'a rien d'exceptionnel, à ceci près : Ingrid est Allemande et elle est née en 1937. Avec son regard de gamine, tour à tour grave et insouciant, elle vit et raconte les derniers mois de la guerre : les trois générations sous le même toit, les jeux des petits Allemands ; les bombardements sur une région qui bientôt sera zone d'occupation russe après un court passage de l'armée américaine ; et le départ après la défaite...
Après Tante Henriette, Ingrid .... Isabelle Dethan semble s'éloigner des albums d'héroy-fantasy de ses débuts pour des récits autobiographiques plus intimistes. Je ne sais pas si le succès sera au rendez-vous mais il serait largement mérité.
Dethan possède incontestablement un grand talent de conteuse en réussissant à ensorceler le lecteur avec une histoire simple et émouvante. 
Encore une fois, la collection Encrage accueille en son sein un petit bijou ...