De Cape et de Crocs : Critique de Julien Robinson


Bravo!
Tout à fait d'accord avec l'avis exprimé. Même si le dessin m'a paru moyennement maîtrisé dans le premier album (très "appliqué", notamment dans les perspectives ou les trognes), une BD savoureuse, qui se déguste comme une pâtisserie complexe.
Comme l'excellent Donjon (mais beaucoup plus humoristique), une série qui doit sa saveur à la présence simultanée de la parodie et du modèle parodié. Comme dans la Vache (entre autres) on y mêle animaux et humains en tenant compte des spécificités de chacun, sans empêcher les animaux d'être des personnages à part entière; cela permet à un personnage d'être amoureux d'une donzelle (humaine), mais de vouloir se ronger la patte pour échapper à un piège! Le lapin est à cet égard un comble, une cristallisation de ce que des personnages animaliers peuvent avoir d'absurde.
Ces personnages sont fortement et efficacement typés dès le début, sans (et c'est un miracle !) sombrer dans la caricature, avec des traits que l'on retrouve tels des clins d'oeil. Cela permet vraiment au lecteur d'avoir l'impression de connaître les personnages comme des amis. L'humour correspond d'ailleurs à un esprit très méditerranéen, c'est a dire que l'outrance est revendiquée, mais l'honneur n'est pas stupide: c'est le même honneur qui fait parler les personnages de Marcel Pagnol, il est joyeux et prompt à être ridiculisé.
Le texte est riche, avec ce verbiage qui rappelle non pas Achille Talon, mais plutôt Saki. La référence au théâtre classique est omniprésente (voir le début du troisième tome!), et on trouve même des scènes d'actions commentées en alexandrins!
Enfin, les auteurs ont aussi potassé d'autres classiques: les personnages sentent le Gotlib (et son descendant Maester), les détails des dessins rappellent des illustrateurs célèbres et anglais de contes (dont j'ai oublié le nom ... honte sur moi!).