Le poisson-clown T3 : critique de Thierry Bellefroid [chroniqueur sur BD Paradisio]
Comme il l'avait fait dans « Les enragés », David Chauvel nous ménage dans cet album une petite révélation sur le passé de l'un des personnages clé du récit, en l'occurrence l'inspecteur Codikow, ripou avéré qui tirait son épingle du jeu à la fin du tome deux. Il nous propose surtout de poursuivre l'incroyable saga d'une valise de diamants et de l'antihéros, Happy Wimbush , le hors-la-loi le plus gentil, le plus serviable et le plus niais que l'histoire de la BD nous ait présenté dans une série réaliste. Car c'est sans doute ce qui fait l'originalité et la force de cette série. Elle nous propose de suivre les tribulations d'un sympathique imbécile sur un mode qui, lui, n'a rien à voir avec la BD d'humour. Au contraire, « Le poisson-clown » a bien sa place dans la collection « Sang-Froid ». Action, coups tordus, polar et poursuites sont au rendez-vous depuis la première heure. Et ça ne faiblit pas.
Chauvel s'est amusé à imaginer un sacré sac de noeuds autour de cette valise de diamants convoitée par la mafia. On ne compte plus le nombre de poursuivants qu'Happy traîne à ses guêtres, tous mus par des motivations diverses. Et ça fonctionne parfaitement. Non seulement on ne s'ennuie pas un instant dans ce troisième album -pas plus que dans les précédents-, mais en outre le scénario ne se contente pas d'égrener les coups de théâtre. Les personnages principaux -à commencer par Happy- sont bien campés et leurs motivations tout à fait plausibles. C'est sans nul doute dans ce genre d'exercice qu'excelle le plus Chauvel (et je n'écris pas ceci parce qu'il fait partie de ces auteurs qui lisent ces chroniques sur bdparadisio sans toujours être d'accord avec ce qui y est dit !)
Au dessin, le vieux complice Fred Simon. Pas de grands changements depuis le début de ce « Poisson-clown », il continue de dessiner des personnages qui ont un petit côté « magazine Spirou » sur fond de décors réalistes, correspondant ainsi parfaitement à la dichotomie du scénario décrite plus haut. Les deux compères semblent d'ailleurs prendre plaisir à jouer sur ce mélange des genres puisqu'ils ont « baladé » Christina Nicieza en costume de Blanche-Neige sur deux moitiés d'albums, alors qu'il s'agit de l'un des protagonistes les plus retors de la série. Autant dire que s'il venait l'idée à Fred Simon de dessiner ses personnages dans un style parfaitement réaliste, « Le poisson-clown » perdrait sans doute quelque chose.
Un mot quand même de ce tic dont il semble se défaire et qui était particulièrement visible dans « Rails ». A quelques rares exceptions près, cet album ne contient plus de personnages avec ce menton remontant en « o » jusqu'au nez comme un masque de chirurgien. Au contraire, Fred Simon propose aujourd'hui un traitement net, et très lisible de ses personnages. Tant mieux !
PS. Une question, comme ça, qui m'obsède : qui a réparé le talon cassé de Debbie, dans le tome deux ?