Comptine d'Halloween T1 : critique de Thierry Bellefroid [chroniqueur sur BD Paradisio]
Il est de notoriété publique que Guy Delcourt est constamment à la
recherche de jeunes dessinateurs... peu gourmands en matière d'émoluments.
On ne s'étonnera donc pas de voir le nom de Denys Quistrebert s'ajouter à la
liste déjà longue des « petits nouveaux » lancés cette année par les éditions
Delcourt. A chaque fois, on se dit que l'éditeur a tapé juste. Malgré les défauts
de jeunesse inévitables, il y a un trait, une facture tout à fait
acceptable. Que l'on pense à « Station debout », « Petit verglas » ou «
Le maître de jeu », par exemple, cette remarque s'applique de la même manière.
D'autant que ces jeunes dessinateurs ne partent généralement pas au feu sans
être assistés d'excellents coloristes, c'est le cas d'Hubert qui fait
oublier bien des défauts du dessin de Denys dans ce premier album de Comptine
d'Halloween remarquablement mis en couleurs. Bien, le préliminaire de
circonstance étant installé, venons-en à l'album, réalisé, donc, par deux
inconnus.
Joël Callede ne s'est pas jeté dans cette histoire au hasard. Il a au moins
relu l'intégrale de Stephen King et pillé la vidéothèque de films
d'horreur de Pau avant de se mettre au travail. Tous les clichés du genre
sont réunis dans ce scénario... à commencer par Halloween, que le cinéma a
déjà exploité jusqu'à la moelle. Alors, que vient faire la BD dans ce
genre que réalisateurs et écrivains ont déjà mille fois abordé ? Peut-être
combler un vide. Rien ne ressemble à Scream en BD, rien ne ressemble à
Shining non plus. Ou c'est trop gore ou c'est du polar. On dirait que Joël
Callede a su taper pile au milieu. Son histoire roule comme une boule de
bowling et on se surprend à jouer les quilles d'un bout à l'autre. Menée
tambour battant, elle arrive à nous faire oublier que nous ne sommes pas au
cinéma. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'on frissonne ici -est-ce possible de
faire frissonner le lecteur de BD ?, j'en doute- mais on se jette à corps
perdu dans cette aventure trop courte et foutrement bien ficelée. Les esprits
négatifs demanderont ce que ce genre d'histoire apporte à la BD sinon
confirmer son statut de succédané du cinéma. Je pense pour ma part que si
les meilleures BD sont celles qui ne sont pas transposables au cinéma, il y a
également place pour « d'honnêtes » histoires en bande dessinée qui
s'inspirent des univers et de la manière de raconter des cinéastes. Celle-ci
en est incontestablement une.