ETHER GLISTER T1 : critique de Thierry Bellefroid [chroniqueur sur BD Paradisio]
Nouvelle série, une de plus, pour Yoann Chivard, le dessinateur surdoué de
Toto l'ornithorynque. Première série, en revanche, pour Nathalie Ferlut qui
évolue pourtant depuis plusieurs années dans le petit monde de la BD et
celui de l'animation. Leur rencontre débouche sur cette histoire de
science-fiction où une femme, Ether Glister, vole bien vite la vedette aux
hommes que l'on croit être les protagonistes principaux au début de l'album.
Le scénario est bien mené, même si la plupart de ses ingrédients ont un
petit côté déjà-vu (planète séparée en deux par une guerre fratricide,
atmosphère irrespirable après un conflit, complot gouvernemental contre un
savant jugé gênant, etc...). Le personnage central -Ether Glister, donc- n'a
pas livré tous ses secrets, loin de là. Le lecteur s'en aperçoit vite,
cette jolie brune a encore plus d'un tour dans son sac. Elle se tire peut-être
un rien trop facilement des embûches que sa scénariste met sur sa route,
mais jusque-là, sans compromettre la crédibilité de l'histoire. Son
faire-valoir, l'officiant La Corneille, oscille entre le rôle d'empêcheur de
tourner en rond et celui d'empoté. Il vient renforcer par opposition la
position dominante et attrayante d'Ether. Quant au dessin de Yoann, il me
semble plus abouti que jamais. Le mélange des techniques amène une mise en
couleur stupéfiante, d'une originalité certaine, qui peut se permettre -à
l'instar d'un de Crécy- de faire fi de toute notion de fidélité à la réalité.
Chez Yoann, la couleur est un mode d'expression en soi, elle raconte les
ambiances et les états d'âme des personnages et de l'auteur à la fois. Elle
vit sa vie propre, loin des codes habituels. Chaque case est surprenante
d'audace. Et à lire cet album, on mesure à quel point le traitement plus réaliste
de Ninie Rézergoude, la série que dessine Yoann sur le scénario de son
complice Eric Omond, manque cruellement de fantaisie dans les couleurs !