Kid Korrigan : critique de Thierry Bellefroid [chroniqueur sur BD Paradisio]


Difficile de savoir si cet album va trouver son public. Guy Delcourt a pris un risque sur ce coup-là (même si le nom de Corbeyran devrait suffire à attirer la curiosité de certains lecteurs inconditionnels du scénariste bordelais) mais on ne le lui reprochera pas. Avec Kid Korrigan, Eric Corbeyran boucle quelque part la boucle de son univers enfantin (Les Soupetard ou Sales Mioches) même s'il ne s'agit pas ici de BD pour enfants. Mais c'est dans la même partie de son imaginaire que le scénariste a puisé l'inspiration. A l'opposé du « Chant des Stryges », il a décapé ses idées à l'extrême, cherchant à toucher dans la simplicité. En sont sorties des histoires d'une planche proches de l'aphorisme et de la réflexion philosophique. Kid Korrigan est donc tout sauf un héros de BD. C'est un petit lutin qui converse avec un son ami dragon et se propose de nous faire sourire tout en nous faisant réfléchir. C'est délicieux, frais. Il n'y pas un mot de trop, c'est spirituel et chaque page ménage la surprise. Mais ne limitons pas le propos au scénario. Régis Lejonc a sa part de responsabilité dans la réussite de l'entreprise. Son dessin épuré et le recours aux seules couleurs proches du brun et de l'ocre assurent une cohérence et une efficacité aux « gags » (le mot ne convient pas tout à fait) imaginés par son comparse. On retrouve la stylisation et le trais épais que Régis Lejonc avait déjà développés dans l'une des deux histoires dessinées sur une adaptation de Corbeyran pour le collectif « Paroles de taulards » mais il y a ici un véritable travail de création d'univers et de recherche de simplicité qui font mouche. On espère que le public récompensera ce joli travail de duettistes.