Petit Verglas T2 : critique de Thierry Bellefroid [chroniqueur sur BD Paradisio]


Au départ, le propos de Petit Verglas peut paraître dur. L'histoire raconte comment un vieux médecin décide d'enfermer une gamine et de la laisser seule faire son éducation, sans aucun contact avec l'extérieur. La petite est nourrie par une trappe et l'homme l'observe, notant jour après jour les réactions de l'enfant, persuadé que la fillette finira par lire d'elle-même ou par apprendre le monde sans aucune aide extérieure. Mais un jour, l'oiseau s'envole et la petite fille croise la route d'un étrange garçon, guérisseur depuis qu'il a mis les mains sur les parois d'un étrange dolmen. Le destin de ces deux enfants va basculer. Eric Corbeyran choisit de nous raconter une histoire qui mêle les éléments fantastiques et les ingrédients plus romanesques. Il évite de nous rejouer « l'enfant sauvage » même si lorsqu'elle s'enfuit, la fillette est incapable de communiquer avec le monde extérieur et totalement prostrée. Dans ce deuxième tome, peut-être plus tragique que le premier, la mécanique mise en place peut donner toute sa mesure. Le destin se joue des personnages et prend un malin plaisir à les placer au mauvais endroit au mauvais moment. Il y a quelque chose de balzacien dans ce récit. Histoire subtile, envoûtante, Petit Verglas est une chronique régionale très début de ème siècle qui sent bon la campagne et les trains à vapeur. Mais c'est aussi une belle histoire humaine avec ses bons et ses méchants, toute une galerie de personnages qu'on se prend à trouver attachants et qui n'ont pas livré tous leurs mystères au terme des deux premiers albums de la série. Au dessin, Riad Sattouf fait ses débuts, avec tout ce que cela comporte de fraîcheur et de maladresse, parfois. On aime ses visages aux grands yeux expressifs, la façon qu'il a de faire passer la tristesse dans le regard d'un chien ou un pli sur le front d'un personnage. On aime moins le manque de maîtrise des proportions qui trahit parfois encore le débutant. Mais on passe très vite outre les petits défauts de confection grâce à la grande lisibilité de l'ensemble.